La musique antillaise : une richesse musicale peu connue en France métropolitaine
Ce que l’on appelle « la musique antillaise » englobe en réalité différents styles musicaux originaires des Antilles françaises. Elle englobe plus particulièrement la musique provenant des îles de la Martinique et de la Guadeloupe. Si on la reconnaît bien grâce à des rythmes entrainants, à des saveurs tropicales et à des paroles chantées en créole, la musique antillaise n’en reste pas moins un style musical peu distribué en France. Et mis à part quelques groupes bien connus en France métropolitaine (et même à l’international), la variété antillaise peine à trouver sa place en métropole, au grand regret de nos oreilles. Focus sur la musique antillaise, sur les différentes formes qu’elle prend et sur les raisons de sa faible distribution.
Aux origines de la musique créole : le métissage
Si la musique apparait aujourd’hui comme un élément central de l’identité et de la culture créole antillaise, il ne faut pas oublier que celle-ci provient avant tout d’un brassage culturel qui a eu lieu en Guadeloupe et en Martinique, et ce, du fait même de leur histoire récente et des échanges culturels entre ces iles et leurs voisins. On retrouve ainsi des influences très marquées de la culture africaine (de par la traite négrière), de la culture indienne (via l’immigration), de la culture caribéenne et latino-américaine (de par leur proximité géographique) et de la culture européenne (l’influence de la métropole).
C’est autour de Saint-Pierre de Martinique que l’on peut retrouver les premières traces de musiques, à proprement parler, antillaises. Cette ville, capitale culturelle des Antilles françaises, et dotées d’un théâtre, accueille entre 1848 et 1902 les premières expressions de la musique créole. C’est au sein des établissements culturels et des restaurants et bars de Saint-Pierre que s’opère alors la fusion de diverses influences musicales et que nait alors la véritable musique populaire martiniquaise et antillaise. Les rythmes et instruments d’origine africaine se mêlent alors aux tempos d’origine centre-américains et aux instruments européens pour donner ce que l’on nomme communément la musique antillaise dont font partie la quadrille créole, la gwoka, la béguine ou encore le bélé.
La destruction de Saint-Pierre de Martinique par l’éruption de la montagne Pelée entraîna alors le déplacement des lieux culturels ailleurs en Martinique et en Guadeloupe, contribuant à diffuser ces nouveaux styles musicaux sur les deux îles.
Aujourd’hui encore, la musique antillaise ne cesse de s’alimenter des influences extérieures, comme du Calypso caribéen ou du Kompa haïtien.
Photo de Marlon Schmeiski
Le mot « kasav » désigne la cassave qui est une galette de manioc en créole.
Différents styles de musique antillaise
On retrouve en Martinique et en Guadeloupe différents styles de musique. On peut classer ces styles musicaux en deux catégories : les « musiques traditionnelles » et les « musiques contemporaines ».
Parmi les musiques traditionnelles, on retrouve les styles de musiques qui sont directement influencés par des sonorités importées d’Afrique, lors de la traite négrière, et les influences européennes. Font partie de ce style le Chouval bwa, la Gwoka, le Bèlè, la Biguine (ou la Biguine orchestrée) ou le Bouladjel qui allient percussions, chants et rythmes africains.
On appelle les « musiques contemporaines » les styles qui se sont nourris d’influences extérieures au cours de la seconde moitié du XXe siècle. On pense notamment aux influences des autres iles caribéennes, mais également aux influences latino-américaines. On retrouve ainsi des styles musicaux tel que le reggae, le dancehall, le hip-hop, le calypso, etc. On retrouve bien évidemment le zouk, style musical emblématique des Antilles françaises, qui apparait à partir des années 80, impulsé par le groupe Kassav et qui est fortement influencé par la Kadans, le Kompa, le reggae et la salsa.
Le Zouk et le Zouk love : le style musical qui a fait connaitre internationalement la musique créole
S’il y a un style musical qui a fait connaitre les Antilles au monde entier, c’est bien le Zouk. Créé au tournant des années 80, le zouk est un mouvement musical qui tourne initialement autour du groupe Kassav et de ses membres, principalement Jacob Desvarieux, Patrick Saint-Éloi Georges Décimus et Pierre-Edouard Decimus.
Dans une volonté de moderniser et de renouveler l’image de la musique traditionnelle antillaise, le groupe Kassav décide alors d’allier la musique traditionnelle antillaise au funk nord-américain, à la salsa et au merengue latino-américain, et au Kompa haïtien. De ce syncrétisme musical nait alors le Zouk qui fera connaitre le groupe Kassav dans le monde entier et qui se produira alors sur les 5 continents.
On retrouve alors dans le Zouk un tempo rapide, et de nouveaux instruments, tel que le synthétiseur ou la boite à rythmes qui viennent remplacer les instruments et les percussions traditionnelles antillaises. Si le Zouk a une rythmique trop rapide pour être dansée à ses débuts, de nouveaux artistes, tels que Francky Vincent ou le groupe Zouk Machine, tendent à ralentir le tempo pour démocratiser le style musical.
C’est à ce moment-là que nait le Zouk Love, notamment sous l’influence de Patrick Saint-Éloi et de Jocelyne Béroard. Ce style musical, caractérisé par un rythme plus lent et des paroles évoquant l’amour et les problèmes sentimentaux, rappelle le soleil, les rythmes tropicaux et ses paroles sucrées et envoutantes conquièrent alors rapidement les Antilles.
Une musique peu diffusée en France Métropolitaine
Et pourtant, malgré une qualité au rendez-vous et un style unique et bien particulier, la musique antillaise n’est que peu diffusée en France métropolitaine. Seuls quelques titres et tubes percent de temps à autre. Pire : les titres diffusés en France ne représentent généralement pas le sérieux des musiciens antillais (on pense notamment à Francky Vincent).
En réalité, les producteurs s’adressent généralement aux Antillais eux-mêmes et non à un public plus large. Ce qui constitue, entre la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane et les Antillais en France, un public de pas plus de deux millions de personnes. Plus encore : il n’existe qu’une seule radio diffusant de la musique antillaise en métropole et les médias traditionnels français (journal télévisé, quotidien ou hebdomadaire) ne s’intéressent que peu aux musiques antillaises. Aujourd’hui, face à cette non-reconnaissance de la musique antillaise, les artistes martiniquais et guadeloupéens s’orientent vers le public caribéen.
Cependant, grâce aux plateformes de streaming, grâce aux réseaux sociaux et aux nouvelles technologies de diffusion musicale, les artistes antillais ont ainsi plus de chance de se faire connaitre en France. Néanmoins, la grande majorité des artistes de musique antillaise restent souvent ignorés en France, alors qu’il existe une véritable variété antillaise dont la qualité et la réputation ne sont plus à faire ni à démontrer.